Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/448

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qui constitue la marche particulière de ce travail ; et le correcteur qui doit connaître cette marche ne saurait hésiter dans l’application qu’il en doit exiger et surveiller.

On ne saurait oublier non plus que, si le journal peut, en définitive, être assimilé à un labeur, c’est, au point de vue de la correction, un labeur d’un genre tout particulier :

La tierce n’existe pas ou, tout au moins, n’est vérifiée que pour l’imposition, lors de la mise sous presse.

Les épreuves d’auteur sont rares : fréquemment c’est entre la rédaction de deux articles, la réception de visiteurs importuns que l’écrivain ou le secrétaire de rédaction jettent un coup d’œil hâtif sur une épreuve dont maintes fois le metteur attendra encore le retour au début du tirage.

Les morasses, il est vrai, font office d’épreuves en secondes ou de bons à tirer ; mais on n’ignore point les conditions dans lesquelles elles doivent être vérifiées et surtout le délai imparti pour les revoir.

Seules, les premières ou typographiques peuvent se comparer utilement aux premières d’un labeur, dans leur ensemble, mais non point dans les faits.

Dans un labeur, les typographiques ne sont que la première des multiples vérifications auxquelles sera soumise la composition ; elle est importante certes, mais entre nombre d’autres qui suivront, soit par défiance, soit pour toute autre raison, elle ne tire son importance que de la collation plus ou moins soignée avec le manuscrit. Dans le journal, au contraire, les premières sont l’unique moyen de contrôle auquel on puisse attacher quelque valeur pour une exacte reproduction du manuscrit ; c’est également la seule lecture en laquelle on puisse avoir quelque confiance[1].

  1. Cette confiance, toutefois, sera de nulle valeur si rédacteurs et correcteurs prétendent « s’ignorer ». — Le correcteur qui se permet de « faire une remarque à un rédacteur » (voir note 1, p. 429) agit non point dans son intérêt personnel, par vanité ou par esprit de mesquine supériorité : une telle attitude est indigne d’un vrai correcteur ; la volonté d’accomplir scrupuleusement sa tâche, le désir de collaborer dans la mesure de ses faibles moyens à la prospérité et au succès d’une œuvre qui lui assure son existence sont les sentiments qui seuls règlent sa conduite. Pourquoi dès lors un rédacteur s’offusquerait-il d’une remarque justifiée, d’une demande raisonnable ? — Que le lecteur se remémore les lignes de A.-T Breton, relatées au chapitre de la Discrétion du Correcteur. Il y eut autrefois entre rédacteurs et correcteurs des sympathies nombreuses ; nous voulons croire que, malgré les temps, à l’encontre de certaines exceptions regrettables, il en est de même aujourd’hui.