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Page:Cazals - Le Jardin des ronces, 1902.djvu/21

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xv
préface

parfums, d’enfermer vivement l’effronterie du chien et du chat qui veulent sauter autour de l’illustre visiteur, enfin, tout l’émoi, tout l’effroi… et toute la piété.

Verlaine lève les yeux :

« Vous permettez ma pipe, Rachilde ? »

Mais ce regard aigu, terrible, noir, est bien celui d’un roi.

Celui-là est chez lui partout.

« Foin des convenances ! On est les Décadents ! »

Cazals rigole, bon gamin, serviable, étourdi, moqueur, un peu fou, ne voyant pas plus loin que le bout de son nez en l’air !

Comme il eut raison de me choisir, moi, inconnue femme de lettres, parmi tant d’autres vrais artistes qui se fussent, je pense, disputé l’honneur de recevoir le grand homme !

Seigneur, je ne suis pas digne de vous voir entrer dans ma maison, mais dites seulement une parole et mon âme sera guérie.

La noble étourderie de Cazals, courant au plus proche de ses camarades (lequel se trouvait, par hasard, être une demoiselle), pour lui confier Verlaine, a déterminé un peu de lumière en moi.

Verlaine m’a raconté son histoire, durant ces journées de repos, et ce n’est pas tout à fait celle que l’on raconte.

Il m’a enlevé de ridicules préjugés bourgeois.

Mon âme fut guérie de désirer de vaines gloires terrestres, toute vraie gloire ne pouvant se signifier qu’à être soi-même, sans hypocrisie.