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PROPOS JAPONAIS

d’abord très rapidement au Japon. Le bon grain tomba à cette époque en une terre féconde. Aussi la moisson y fut-elle abondante et considérable.

Le premier semeur évangélique du Japon fut saint François-Xavier. Le vaillant apôtre des Indes y avait été appelé manifestement par Dieu lui-même. Il se trouvait alors à Malacca, lorsque, un soir, il reçut la visite d’un Japonais. Cet homme, appelé Anjiro, dont la conscience était chargée de crimes, avait entendu dire à certains Portugais venus à Kagoshima, sa ville natale, qu’aux Indes se trouvait un homme merveilleux, partout reconnu comme un guérisseur d’âmes. Sans tarder, il était venu à Malacca prier ce sage de chasser de son âme les terribles remords qui la torturaient. Ravi de joie, Xavier rétablit la paix dans ce cœur désemparé, en instruisant et en baptisant Anjiro et les deux serviteurs qui l’avaient suivi. Enfin, sur les instances de ses trois néophytes, obéissant d’ailleurs au grand désir qu’il en avait lui-même, il fit voile pour le Japon et aborda à Kagoshima, l’an 1549, en la fête de l’Assomption de Marie. Il avait aussi avec lui deux autres religieux de la Compagnie de Jésus : le Père Côme de Torrès et le Frère Jean-Fernandez.

Sans retard, Xavier se livre à l’étude de la langue, et au bout d’un mois et demi il ne craint pas de s’adresser publiquement aux foules. On l’accueille d’abord avec indifférence, mépris, insultes même. Mais son invincible courage le porte au contraire à pénétrer jusque dans les pagodes pour y discuter avec les bonzes, appuyant son raisonnement par d’éclatants miracles. Bien loin de se rendre, les bonzes irrités obtinrent du Daimyo de Kagoshima un décret de bannissement.