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APERÇU GÉNÉRAL DU CATHOLICISME

La haine des bonzes était alors à son comble. À tout moment, ils assiégeaient les cours des princes, revendiquant l’honneur de leurs divinités, outragées, disaient-ils, par la diffusion du christianisme, et leur prophétisant la ruine totale du pays, s’ils ne répondaient pas au devoir d’exterminer complètement cette religion perverse. Ils cherchaient même à soulever le peuple, comme autrefois les pharisiens, le poussant à massacrer ces missionnaires dont la puissance mystérieuse les écrasait.

Au fond, leur zèle apparent n’était qu’une grossière et brutale jalousie. Grâce à l’atmosphère sacrée des temples dans lesquels ils vivaient, grâce aussi à la réputation d’austérité qu’ils savaient habilement se ménager aux yeux du peuple, ils avaient conquis sur celui-ci un prestige merveilleux, à l’abri duquel ils cachaient leur odieuse mauvaise foi et leurs incroyables turpitudes.

Cependant, les missionnaires eurent vite fait de démasquer cette hypocrisie pharisaïque. De plus, les bonzes déjà convertis dévoilaient impitoyablement aux foules l’immoralité secrète de leurs anciens collègues. De là la colère de ces derniers, de là aussi leurs intrigues acharnées.

D’autre part, la réalisation de l’unité nationale à cette époque, si elle fut salutaire au pays, fut par contre, fatale au christianisme. Cette unité fut réalisée par la contribution successive de trois hommes de génie : Nobunaga, Hideyoshi et Yeyasu, qui, en écrasant par les armes la puissance des seigneurs, relevèrent aux yeux de tous l’autorité de l’empereur et rétablirent partout la paix dans l’empire.

Mais cette situation devenait plus critique pour le christianisme. Dans une certaine mesure, l’état d’anar-