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retard pour un train qu’ils auraient dû prendre ; ils en attendront là un autre qui ne partira peut-être que le soir. Quant au dîner, c’est le moindre de leurs soucis : ils mangeront sur le train ou ils ne mangeront pas du tout, et dormiront pour oublier la faim.

Dans la gare, surtout dans la salle d’attente de la 3ème classe, c’est le pêle-mêle des gens peu fortunés ou de bas rang, tous chargés comme des mulets : on ne voit que des sacs, des poches, des valises, des marmots : les Japonais portent tout sur leur dos. Ce n’est guère que dans la salle de 1ère et de 2ème classe qu’on peut voir des gens portant leurs valises à la main. Ces derniers sont aussi mieux habillés, plus distingués dans leur mise ; beaucoup d’entre eux, les hommes, — non pas les femmes, — portent le costume étranger.

Toute cette foule ne cause guère. Cependant, elle ne demeure pas une minute en place : à part quelques-uns qui s’allongent sur les bancs, les autres ne cessent de se promener de-ci de-là, sans se parler ; et on n’entend, dans les salles, que le cric-crac des geta grinçant sur le parquet de ciment.

Mais voici le train : une petite locomotive avec de petits wagons aux roues ajourées : au Japon, tout est petit. La foule se rue alors aux barrières qui ferment l’entrée des plateformes, et par lesquelles on ne pénètre qu’un-à-un.

Or, parmi cette foule, il n’y a pas que des passagers ; il y a aussi le nombre considérable de ceux qui sont venus reconduire leurs parents en partance.

Ce n’est pas trop dire, que de qualifier le nombre de ces gens-là de « considérable » ; vraiment, c’est là une chose bien plus frappante ici qu’à l’étranger. En