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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/479

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IDEE GENERALE DU CYCLE 429

passé, dont ses grands poètes épiques venaient de glorifier quelques parties. Le rapt d'Hélène, le ras- semblement des Grecs à Aulis, leur double débar- quement en Troade, les prises de villes et les inci- dents divers qui étaient censés avoir rempli neuf ans avant la querelle par laquelle s'ouvre Vlliade^ et d'autre part la mort d'Achille, la défaite des der- niers alliés de Priam, et enfin la prise même d'Ilion, tout cela ne pouvait désormais rester perdu dans de vieux et obscurs récits poétiques qu'on n'osait plus chanter. Et les retours des chefs, et leur dispersion, et leurs malheurs domestiques, et les fondations de colonies lointaines, n'élait-ce pas là une foule vi- vante de souvenirs nationaux qui appelait la poésie, qui réclamait son concours, et qui se plaignait d'élre injustement oubliée?

Malheureusement, si impérieuse que fût cette né- cessité morale, tout essai de ce genre était condamné à de médiocres résultats. V Iliade et V Odyssée avaient absorbé par avance ce que le génie épique pou- vait créer de meilleur. Après tout, les genres littéraires ne sont pas inépuisables. Il était au- dessus des forces humaines de construire désor- mais, sur le même fond de légendes, de longs récits, sans y ramener des situations analogues, des senti- ments presque identiques, des personnages déjà connus sous d'autres noms. Et ce n'était là que le moindre inconvénient de l'entreprise ; le plus grave tenait à une raison plus intime. V Iliade^ dans sa lente élaboration, avait trouvé son unité, comme nous l'avons montré, dans un fait moral simple et prédo- minant: la colère d'Achille, ses phases et ses consé- quences. VOdyssée avait grandi de même autour du personnage d'Ulysse attaché à un seul sentiment. Mais comment donner ce genre d'unité aux récits nou-

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