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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/162

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CHAPITRE III. — RHÉTORIQUE, HISTOIRE, ETC.

sir dans les découvertes antérieures, de les classer et de les exposer. Par là, il est vrai, son art se rattache en quelque mesure à celui de l’écrivain. On a dit avec une finesse ingénieuse que la géométrie, telle que les Grecs nous l’ont faite, portait la marque de leur esprit au même degré que leur littérature[1]. S’il est incontestable qu’une certaine rigueur et subtilité dialectique, aussi bien dans la démonstration d’un théorème que dans un dialogue de Platon, est comme la signature de l’hellénisme, la géométrie traditionnelle est profondément hellénique. Or elle doit ce caractère à Euclide pour une forte part. C’est pour cela que les historiens de la littérature sont tenus de nommer dans leurs histoires Euclide d’abord, et, par une raison analogue, tant d’autres savants ou érudits qui ont également fait passer dans leurs travaux cette tournure propre de l’esprit grec, l’aptitude à enchaîner des idées avec souplesse et rigueur, par une série de raisonnements bien liés.

En médecine, l’œuvre des Alexandrins n’a pas été moins considérable. Dès la fin du ive siècle et le commencement du iiie, deux très grands médecins, Hérophile de Chalcédoine et Érasistrate d’Iulis, ont fait faire à l’anatomie d’immenses progrès. Non contents de disséquer des cadavres, ils opéraient des vivisections, sur des animaux le plus souvent, parfois même sur des criminels, mis à leur disposition par les rois d’Égypte ou de Syrie[2]. Hérophile avait écrit une Anatomie et de nombreux traités sur des points de détail[3]. Érasistrate est le

  1. G. Milhaud, La géométrie grecque considérée comme œuvre personnelle du génie grec, dans la Revue des Ét. g., 1896, p. 371-423. Cf. Tannery, La géométrie grecque (1887), p. 142-143, avec une très intéressante citation de Proclus sur ce sujet.
  2. Cf. Celse, Préf. du liv. I, p. 4 (éd. Daremberg) ; Tertullien, De Anima, 10 (passages cités par Susemihl, I, p. 777, n. I 3).
  3. Il avait même touché a la philologie par des études sur les