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CHAPITRE IV. — LA POÉSIE ALEXANDRINE

œuvres de Théocrite dans l’âge alexandrin, mais on l’entrevoit. Il y a eu des recueils factices de différentes sortes : tantôt on réunissait ensemble les poèmes bucoliques du seul Théocrite, à l’exclusion des œuvres analogues de ses imitateurs[1] ; tantôt, au contraire, on faisait une sorte de corpus des poètes bucoliques[2] ; ou bien encore on formait des collections de pièces choisies appartenant à divers genres, mais composées par le seul Théocrite ; ou enfin des recueils tout à fait hétérogènes, du genre de l’Anthologie. L’ensemble que nous ont conservé nos manuscrits sous le nom de Théocrite est sorti de ce long travail antérieur. On y lit encore, dans la IXe Idylle (v.  28-36), des vers qui ont dû servir d’épilogue à un recueil exclusivement bucolique[3]. De là vient que cet ensemble comprend d’une part des pièces qui ne sont pas de Théocrite, et d’autre part des pièces de Théocrite qui ne sont pas des bucoliques.

Les pièces apocryphes sont celles qui portent les numéros 19, 20, 24, 23 et 27 (Le voleur de miel. Le jeune bouvier. Les pécheurs. L’amant. L’Oaristys). Quelques-uns rejettent encore les idylles 25 et 30 (Héraclès tueur du lion. L’enfant aimé) et en soupçonnent deux ou trois autres. Nous ne partageons pas ces scrupules ; on verra pourquoi par la suite[4]. Quant aux cinq pièces qu’il faut écarter, nous n’avons que peu de mots à en dire : une seule, L’Oaristys, est une œuvre de grand talent : il en

  1. L’épigramme 22, où Théocrite est censé parler, servait de prologue à un recueil de ce genre ; il y disait : Μοῦσαν δ’ ὀθυείην οὔτιν’ ἐφειλκυσάμην.
  2. Ainsi Artémidore d’Éphèse, qui disait dans une épigramme préface analogue (22 des Theocritea) : Βουκολικαὶ Μοῖσαι, σποράδες ποκα, νῦν δ’ ἄμα μᾶσαι — ἐντὶ μιᾶς μάνδρας, ἐντὶ μιᾶς ἀγέλας (n’ont plus qu’un râtelier, ne forment plus qu’un troupeau).
  3. Ces vers contiennent, comme l’épigramme d’Artémidore, l’expression Βουκολικαὶ Μοῖσαι, qui n’est pas de la langue de Théocrite.
  4. Nous admettons cependant des remaniements et des interpolations dans l’Idylle IX, où se trouve l’épilogue cité plus haut.