Aller au contenu

Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/251

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
233
APOLLONIOS DE RHODES

rer la distance qui sépare cette versification habile de la vraie grandeur, on n’a qu’à relire, dans la quatrième Pythique de Pindare, le récit du départ de Jason[1]. Une fois le navire en marche, Orphée fait entendre un chant[2] : le poète, ici, se souvient d’Empédocle et arrive presque à la grandeur ; Virgile, dans son Silène (Églogue VI), André Chénier, dans son Hermès, ont fait à l’auteur des Argonautiques l’honneur de s’inspirer de ce passage, dont le mouvement général est beau, malgré un peu de sécheresse encore dans le détail. Quand le navire passe en vue de la Thessalie, les dieux le regardent du haut de l’Olympe, et les Nymphes Péliades sortent de leurs retraites pour l’admirer[3] ; jolis vers, d’un pittoresque aimable. À Lemnos, la rencontre de Jason et d’Hypsipyle, la reine des Amazones, est assez froidement racontée. Plus loin, les Argonautes combattent des géants et les tuent : une belle comparaison, pittoresque et neuve, nous montre les géants morts étendus sur la grève, pareils à des poutres immenses que les bûcherons couchent au bord d’une rivière, les faisant baigner dans l’eau pour les durcir[4]. Au milieu de tout cela, force présages et apparitions, prophéties de Mopsos, d’Apollon, de Glaucos, de Phinée, etc. ; force érudition surtout et explications géographiques, mythologiques, étymologiques. Puis, un autre gracieux épisode, celui de la mort d’Hylas, très probablement imité de Théocrite, avec plus de pittoresque et moins de sentiment vrai[5]. Tout le second chant est formé de la même manière. Au début du troisième, les héros sont en Colchide. Héré et Athéné, protectrices de Jason, s’occupent alors de lui assurer la complicité de Médée :

  1. Pindare, Pyth. IV, 224-238.
  2. Vers 494-515.
  3. Vers 540-580.
  4. Vers 1011.
  5. Vers 122 et suiv.