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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/271

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DIOSCORIDE, ALCÉE, ANTIPATER DE SIDON

considèrent ce morceau comme n’étant pas de Moschos[1]. Le poème d’Europe raconte l’enlèvement de la jeune fille par Zeus, métamorphosé en taureau. Le récit est facile et agréable. L’arrivée du taureau dans la prairie, ses caresses à Europe, l’enjouement de celle-ci quand elle s’asseoit sur son dos puissant, son étonnement (plus spirituel qu’effrayé) quand le ravisseur l’emporte au milieu des flots de la mer, forment un tableau gracieux et pittoresque : le style est d’une simplicité aimable qui s’accorde bien avec l’emploi du dialecte ionien. Nous avons ici sous les yeux l’un de ces modèles de jolie poésie alexandrine que Catulle aimait tant, et dont il devait s’inspirer dans son Épithalame de Thétis et de Pélée.


À côté de ces genres divers, nous trouvons enfin, dans cette période, le genre alexandrin par excellence, l’épigramme, que tous les poètes ont traité à l’occasion, mais qui a fait plus spécialement l’occupation de quelques-uns et leur a donné la célébrité, comme autrefois à Asclépiade de Samos et à Léonidas de Tarente. Ces poetae minores sont légion : nous en connaissons plus de quarante[2]. L’art de tourner élégamment quelques distiques était devenu, à cette époque, familier à tous les hommes cultivés : historiens, savants, érudits, hommes d’état, hommes du monde s’en mêlent à l’occasion, et ne s’en tirent pas mal. Faire une épigramme est un jeu pour ces beaux-esprits. Les modèles sont si nombreux et si connus qu’il est facile de les imiter. Dans cette foule de poètes, artistes ou simples amateurs, le talent est monnaie courante. Ce qui est rare, c’est l’originalité. Rien ne ressemble à une épigramme de l’un

  1. Cf. Susemihl, I, p. 232.
  2. Cf. Susemihl, II, p. 541-565. Cf. aussi Ouvré, Méléagre de Gadara, Paris, 1894, p. 81.