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DION DE PRUSE ; SA VIE

durent alors le retenir plus régulièrement à Pruse ; là même, il eut à user de tout son talent pour désarmer certaines jalousies et lutter, une fois au moins, contre un mouvement populaire[1]. Mais un bien autre danger le menaçait. Il avait lié amitié à Rome avec plusieurs grands personnages, et notamment avec un des parents de Domitien, qui semble avoir été Flavius Sabinus[2]. Celui-ci fut mis à mort en 82 par le nouvel empereur, qui crut voir en lui un prétendant possible à l’empire[3]. Les relations que Dion avait eues avec Sabinus, et peut-être des paroles trop libres, le rendaient suspect[4]. Il fut éloigné par mesure administrative, avec interdiction de se montrer ni en Italie ni en Bithynie[5].

Cet exil dura quatorze ans[6]. Dion dut abandonner Pruse, ou il laissait sa femme avec son jeune fils[7], et des intérêts gravement compromis par son absence. Pour être oublié, il se fit pauvre et vagabond[8]. Il erra par la Grèce, vivant avec les gens du peuple et relisant pour se consoler, les deux seuls livres qu’il eut emportés avec lui, selon Philostrate, le Phédon de Platon et le

  1. Or. 46. Il n’a pas encore payé certaines dettes de son père ; il est en train d’arranger ses affaires ; il n’a encore qu’un petit enfant.
  2. Emperius, De exilio Dionis, p. 5-7. H. von Arnim, ouv. cité, p. 223 et suiv., accepte entièrement et confirme les vues d’Emperius.
  3. Suet., Domit., 10.
  4. Or. 13 début : Ὅτε φεύγειν συνέβη με φιλίας ἕνεκεν λεγομένης ἀνδρὸς οὐ πονηροῦ, τῶν δὲ τότε εὐδαιμόνων τε καὶ ἀρχόντων ἑγγύτατα ὄντος, διὰ ταῦτα δὲ καὶ ἀποθανόντος δι’ ἂ πολλοῖς καὶ σχεδὸν πᾶσιν ἐδόκει μακάριος, διὰ τὴν ἐκείνων οἰκειότητα καὶ συγγένειαν. — ταύτης ἐνεχθείσης ἐπ’ ἐμὲ τῆς αἰτίας, ὡς δὴ τἀνδρὶ φίλον ὄντα καὶ σύμβουλον.
  5. H. von Arnim, p. 232.
  6. Or. 40, début : Ἐν τοσούτοις ἕτεσι φυγῆς.. Ibid. Τοσοῦντον χρόνον πλανηθείς.
  7. Ibid.
  8. Ibid. : Οὐ μόνον ἄοικος καὶ ἀνέστιος, ἀλλὰ μηδὲ ἀκόλουθον ἕνα γοῦν ἐπαγόμενος. Philostrate, pass. cité, ajoute ici des détails suspects.