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Page:Darmesteter - Essai sur la mythologie de l’Avesta.djvu/22

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§ 9. Comme Ormiizd a son rival, Ahriman, ainsi chaque Amsliaspand a son contre-arashaspand. Ceux de Haurvatâ^ et d’Ameretâ^ sont tout donnés ; Haurvatâ^, génie des eaux, combattra la soif ; reste à Ameretâ^ à combattre la faim[1]. Ils terrasseront chacun leur ennemie dans cette lutte finale où le Sauveur, fils de Vîçpa-taurvi, viendra frapper « la Drukh mauvaise, à l’éclat sinistre, née des ténèbres » et où chacun des génies de la bonne création écrasera le génie contraire, « Akem-mmio (la Mauvaise Pensée) frappe, mais Vohu-manô (la Bonne Pensée) le frappe à son tour ; le Mensonge frappe, mais la Vérité le frappe

    déens devenus pieux Musulmans, croient encore au dusqarethem sous d’autres noms : Parses et Persans, là-dessus, sont d’accord, dans le fond. C’est que la théorie de l’enfer est en réalité la même dans le Coran et dans l’Avesta. Si Ormuzd fait nourrir les infidèles de poison et de mets fétides, Allah les fait abreuver du hhaviîm et du ghassâq (l’eau bouillante et le pus, chap. 38, 57 ; 78, 25) ; il les fait nourrir du Zaqqùm, cet arbre qui pousse au fond de l’enfer et dont les fruits sont des têtes de démons (37, 62). Ici, comme souvent, les croyances nouvelles que les Arabes apportaient aux Persans étaient pour ceux-ci de vieilles connaissances. Je ne veux point dire que l’enfer arabe soit un emprunt au Mazdéisme : je n’ai pas à m’occuper de l’origine de la conception arabe, je veux seulement noter l’identité fondamentale des deux conceptions. Les différences de détail étaient sans doute caractéristiques : mais comme ces différences étaient toutes à l’avantage du Coran, où les traits sont plus accentués et plus saillants, les Iraniens durent reconnaître dans l’enfer arabe leur propre enfer, mais dessiné d’une façon plus nette, en traits moins vagues, moins généraux, plus saisissants. Donc, tout en changeant de religion, leur idée de l’enfer ne changea point : le Coran ne fit que leur apporter sur le séjour des damnés des renseignements nouveaux et inédits, mais qui portaient en eux tout le caractère de la vérité, car ils concordaient avec l’ancienne description et la complétaient. Pour un lecteur des Gàthâs, ces deux choses qui attendaient le damné, dusqarethem, avaetâç vacô^ nourriture déplaisante et paroles d’ironie (vide supra le texte), se trouvaient parfaitement expliquées dans ces lignes du Coran : « L’arbre du Zaqqûm sera la nourriture du coupable. Il bouillonnera dans leurs entrailles comme un métal fondu, comme bouillonne l’eau bouillante. On criera [aux » exécuteurs des œuvres de Dieu] : Saisissez le méchant, et précipitez-le au fond de l’enfer, et versez sur sa tête le tourment d’eau bouillante. Goûte ceci, [lui dira-t-on], tu es le Puissant, l’Illustre (44, 43 » sq. trad. Kazimirski). » Ici donc, le changement de religion n’est qu’apparent : le Coran continue la tradition Mazdéenne, qui persiste sans interruption. Nous trouverons plus loin un autre exemple de permanence, mais cette fois franchement mazdéenne et anti-islamique (§ 41).

  1. Cf. toutefois § 40.