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XI. — ABBOTTABAD ET LA VIE DE GARNISON

quatre races et trois religions[1]. Ce composé, abandonné à lui-même, ferait une cohue anarchique : l’état-major anglais lui donne une tête et en fait un corps. Les régiments Gourkhas seuls sont homogènes.

Les Gourkhas, comme ou sait, sont la caste guerrière du Népal. Dans l’invasion anglaise de 1816 ils résistèrent avec tant de bravoure, que les Anglais se dirent qu’il valait mieux prendre à leur service ces soldats incomparables que de se faire écharper par eux. Il fut stipulé dans le traité de paix que le Râja du Népal permettrait à ses sujets de prendre service dans l’armée anglaise. Chaque année les officiers recruteurs se rendent à Bharaitch, sur la frontière du Népal — car l’entrée du Népal leur est fermée ;  — les candidats viennent se présenter en masse et le recrutement fait son choix. Une fois enrôlé, le Gourkha n’a plus qu’une patrie, le drapeau ; il appartient à ses chefs, corps et âme : car il est étranger dans l’Inde, autant que l’Anglais, et son isolement assure sa fidélité. Il est étranger de race, car il est d’origine Mongoloïde ; de religion, il appartient nominalement au Brahmanisme, mais c’est un Brahmanisme bien imparfait, qui

  1. Sikhs, Musulmans (Afghans et Pendjabis), Hindous (les Dogras ; les Dogras sont une caste guerrière du Nord-Ouest qui a fourni au Cachemire sa dynastie présente).