Page:Darmesteter - Lettres sur l’Inde, à la frontière afghane.djvu/363

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
325
XIV. — DE LAHORE À PARIS

pressés, vers Muttra, demi-nus, le bâton en main : ils viennent de tous les coins de la province, pour se baigner demain matin à la Ghat de Visranti, dans les eaux saintes de la Jamouna.

La voiture avance sans peine à travers la gelée humaine qui s’ouvre et fait haie, reconnaissant un Européen. La route trop étroite nous oblige bientôt à descendre et le passage devient plus difficile. « Mettez votre chapeau, me dit l’agent du Seth, pour faire peur à la foule ; » le chapeau européen, le solar hat, emblème de la suprématie anglaise, plus respecté et plus puissant que tout un détachement de police indigène. Quelle chose commode que ce bon peuple hindou ! — triste au fond,  — mais je ne suis pas en humeur, tandis que j’en profite, de philosopher sur le côté triste de la chose.

La flamme de la Divali est au lac sacré, la Manasi Ganga : une digue divise le lac en deux parties : cette digue, me dit-on, n’est autre que la montagne de Krichna qui s’est affaissée. Au bord du lac s’élèvent une série de palais bâtis par la piété des Radjas, qui veulent avoir un pied à terre dans la localité sainte. Le plus riche de ces palais est celui du Radja de Bharatpor : tout le long de la façade, des escaliers de pierre, des Ghats, descendent dans le lac : toutes les marches sont en feu, couvertes de milliers de co-