Page:Diodore de Sicile - Bibliothèque historique, Delahays, 1851.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
3
LIVRE I.

lois, d’autres enfin à devenir, par l’invention des sciences et des arts, les bienfaiteurs du genre humain.

Il faut réclamer pour l’histoire une large part dans les éloges accordés aux actions qui contribuent au bonheur général. Incontestablement, elle rend les plus grands services à l’humanité en plaçant les modèles de la vertu en face du vice démasqué. Si la fiction des enfers contribue puissamment à inspirer aux hommes la piété et la justice, quelle influence bienfaisante doivent exercer sur les mœurs et sur la morale les récits véridiques de l’histoire ! La vie d’un homme n’est qu’un moment de l’éternité ; l’homme passe et le temps reste. Ceux qui n’ont rien fait qui soit digne de mémoire meurent avec leur corps et avec tout ce qui se rattachait a leur vie ; tandis que les actes de ceux qui sont arrivés a la gloire par la vertu se perpétuent et revivent dans la bouche de l’histoire, Il est beau, ce me semble, d’échanger une renommée immortelle pour des travaux périssables. Hercule s’est immortalisé par des travaux entrepris au profit du genre humain. Parmi les hommes de bien, les uns ont été mis au rang des héros, les autres ont reçu des honneurs divins ; tous ont été célébrés par l’histoire, perpétuant leur mémoire selon le mérite de chacun.

Tandis que les autres monuments deviennent la proie du temps, l’histoire enchaîne, par sa toute-puissance, le temps, qui use tant de choses, et le force en quelque sorte à transmettre ses témoignages à la postérité. Elle contribue aussi au développement de l’éloquence, le plus beau talent de l’homme. C’est par l’éloquence que les Grecs l’emportent sur les Barbares, comme les gens instruits l’emportent sur les ignorants. C’est par le seul secours de la parole qu’un homme peut se rendre maître de la multitude. En général, l’effet d’un discours est déterminé par le pouvoir de l’éloquence. Nous accordons des éloges aux bons citoyens qui, sous ce rapport, se sont élevés au premier rang.

En poursuivant ce sujet, qui se divise en plusieurs parties, nous remarquerons que la poésie est plus agréable qu’utile ;