Page:Gautier - Isoline et la Fleur Serpent, Charavay frères, 1882.djvu/153

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
153
LA FLEUR-SERPENT

fous ? Et qu’étais-je moi-même, de ne pas oser regarder ?

Je me précipitai, et, aussitôt que mes regards eurent fouillé cette terre remuée, le même cri qui venait d’épouvanter mon oreille s’échappa de mon gosier. Je ne m’étais pas trompé : c’était bien là une tombe, un mort était là-dedans.

Oh ! l’horrible, la hideuse, l’abominable vision ! Les racines, comme des serres, tenaient dans leurs griffes un crâne, des membres qu’elles convulsaient dans une pose atroce ; c’était un squelette non complètement dépouillé, avec des restes de cheveux et de barbe se mêlant aux filaments de la plante, des lambeaux d’étoffe. Les yeux creux semblaient me regarder, ils me fascinaient et mes cheveux se dressaient d’horreur. Une plainte sembla s’élever, croître, devenir distincte ; je l’entendis nettement : « Venge-moi. »

Alors une clarté subite se fît dans mon esprit ! Je me mis à courir, comme un fou vers la maison.

Les malheureux étaient encore dans la même pièce, qu’éclairaient maintenant de grandes bougies à l’aspect funèbre.

— « Scala ! c’est Scala ! » m’écriai-je en entrant,