Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 3.djvu/207

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’amoindrissement ? Sans doute il était de la même nature que les autres êtres du Plerum, lequel Plerum est l’œuvre du Père. Or, les semblables ne se dissolvent ni ne s’amoindrissent par les semblables ; au contraire, ils s’accroissent et se fortifient ensemble, comme le feu dans le feu, l’air dans l’air, l’eau dans l’eau, tandis que les contraires sont tourmentés et dissous par les contraires. Si l’Æon dont on nous parle eût été une émanation de la lumière, loin de périr dans cette lumière, il n’aurait fait qu’y prospérer et s’y accroître, comme le jour s’accroît par l’approche du soleil : nous faisons cette comparaison avec d’autant plus de raison, qu’on nous dit que le Bythus n’est autre chose que l’image et le reflet de son Père. Les animaux périssent par le contact et le mélange de toutes les substances qui sont étrangères ou opposées à leur nature, tandis qu’ils reçoivent de l’accroissement et de la force de celles qui sont en rapport et en affinité avec eux. Si donc Sophia est de la même substance que tous les êtres du Plerum, il n’a pu recevoir aucun dommage de leur contact et de leur mélange, étant, avec ses homogènes et ses semblables, esprit avec l’esprit. Car, pour nous, êtres corporels, la crainte, l’horreur, la souffrance et la mort ne sont peut-être produites que par la lutte entre les contraires ; tandis que les esprits, qui vivent dans les flots de la lumière et avec leurs homogènes, ne sont pas sujets à ces maux. Je suis donc tenté de croire que les valentiniens ont pris dans les comédies de Ménandre, où l’on voit un personnage éperdu d’amour et en même temps haï par l’objet aimé, le type de leur infortunée Sophia. Leurs inventions, en effet, ont beaucoup plus de rapport avec les passions des hommes qu’avec les essences célestes et divines.

D’ailleurs, nous le demandons, comment supposer que le désir infini de connaître la perfection du Père, de le comprendre et de se réunir à lui, eût pu entraîner un Æon, cet être tout esprit, dans une voie de malheur et d’ignorance ? Bien au contraire, ce désir dont il était possédé devait le faire arriver à la perfection, à l’immortalité, et à la connaissance suprême de la vérité. Et, en effet, quand les hommes s’occupent à méditer sur les choses au-dessus d’eux, pour arriver à la connais-