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laquelle ils donnent pour origine l’ignorante et le péché, et qui deviendra ainsi plus efficace et plus puissante que la lumière céleste du Père, puisqu’elle donnera à cette semence un accroissement, une perfection, une beauté que la lumière incréée n’avait pu lui donner. En définitive, la matière, qu’ils font l’équivalent des ténèbres, aura plus d’efficacité et de puissance que la lumière divine elle-même. Puisque cette matière a une si grande vertu, n’est-il pas ridicule de soutenir qu’elle a failli faire périr leur mère Achamoth, qui suffoquait pressée dans les liens de cette matière, si, rassemblant toutes ses forces, et aidée du secours du Père, elle ne fût parvenue à se débarrasser de ses étreintes. Voilà donc la semence divine qui reçoit la forme et l’accroissement, parce qu’elle s’unit à cette même matière ! et ce prodige encore s’opère par l’union des contraires et par leur fermentation réciproque, puisque, d’après nos adversaires, la matière est opposée à l’esprit, et l’esprit à la matière ; ce qui est contradictoire.

Mais voici une autre difficulté : La mère Achamoth, en voyant les anges qui accompagnent le Sauveur, conçoit des formes pareilles à celles de ces anges, et cependant elle n’en conçoit pas une qui soit semblable au Sauveur, qui est bien plus beau encore que ses anges. Est-ce donc que la vue du Sauveur lui a déplu, et que pour cela elle n’a pas voulu concevoir une image semblable à lui ? Et quant à Demiurgos, qu’ils appellent Psychique, et auquel ils donnent une forme et une figure particulières, il aurait été créé parfait, quant à sa substance matérielle ; mais il serait venu au monde imparfait, quant à l’esprit, qui lui était cependant bien plus nécessaire : c’est pour cela qu’il a fallu qu’il descendît dans une âme humaine qui lui devait donner la perfection et l’intelligence. Si donc il a besoin de la forme terrestre et animale pour être parfait, c’est qu’il n’est nullement semblable aux anges, qui sont les lumières des cieux, et qu’il ne peut ressembler qu’aux hommes. Il ne peut, en effet, ressembler qu’aux êtres sur le modèle desquels il a été formé, comme un volume d’eau prend la forme du