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parcourir les pages de saint Clément avec un respect marqué ; et je ne pus m’empêcher de voir que, même dans ce siècle simple et ennemi de toute controverse, où il y avait si peu de différends à terminer, la prédiction de la chaire de saint Pierre avait été pleinement reconnue.

Un schisme, ou comme saint Clément l’appelle, une sédition impie et scandaleuse, ayant éclaté dans l’Église de Corinthe, on fit un appel à celle de Rome pour demander ses conseils et son intervention, et l’épître que ce saint Père adressa aux Corinthiens, en réponse à leur demande, est universellement reconnue pour un des monuments les plus intéressants de littérature qui nous soient parvenus.

Parmi les premiers disciples des apôtres dont les écrits attirèrent ensuite mon attention, fut saint Ignace, successeur immédiat de saint Pierre dans le siège d’Antioche. Les contemporains de ce saint homme le désignaient par l’épithète de Théophore ou Dieu porté, parce qu’ils croyaient qu’il était cet enfant que notre Sauveur prit dans ses bras et plaça au milieu de ses disciples. Ce fut donc avec un sentiment de curiosité mêlé de respect, que j’abordai son ouvrage ; et quelque grand qu’eut été mon étonnement, en voyant un pape ou un évêque de Rome présider à une pareille époque au monde Chrétien, les dogmes qui se présentèrent à mes yeux dans les pages de saint Ignace m’étonnèrent et m’embarrassèrent bien davantage ; un écrivain qui s’était élancé le premier sur les pas du divin Maître, n’était certainement pas celui dont j’attendais une doctrine aussi essentiellement catholique que celle de la présence réelle, que j’avais toujours regardée comme une invention des siècles les plus ténébreux, maintenue en dépit de la raison aussi-bien que des sens.

Parlant des docètes ou fantastiques, hérétiques qui croyaient que Jésus-Christ n’était homme qu’en apparence, une image ou un simulacre de l’humanité, saint Ignace s’exprime ainsi : « Ils s’éloignent de l’Eucharistie et de la prière, parce qu’ils ne veulent pas reconnaître que l’Eucharistie est la chair de notre Sauveur, cette chair qui a souffert pour nos péchés. »