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APPENDICE.

jusqu’à ce qu’il vînt une idée à Ibn-ez-Zobeir, qui alla de nuit trouver Ibn-Sâd et lui dit : « J’ai réfléchi sur l’affaire dans laquelle nous sommes engagés, et je vois qu’elle traînera en longueur ; l’ennemi est chez lui ; il vit dans l’abondance pendant que nous voyons chaque jour diminuer nos ressources, et j’ai appris que Djoredjîr fait venir des troupes de tous côtés. Maintenant, je vois que ses gens, lorsqu’ils entendent annoncer chez nous l’heure de la prière, remettent l’épée dans le fourreau et rentrent dans leur camp ; les musulmans en font de même, selon leur coutume. Ainsi donc, je te conseille de laisser demain les plus braves d’entre les musulmans dans leurs tentes, avec leurs chevaux et leurs armes, pendant que d’autres iront se battre comme à l’ordinaire et feront durer le combat jusqu’à ce que l’ennemi soit accablé de fatigue ; alors, quand il sera rentré dans son camp et aura mis de côté la cuirasse et les javelots, les musulmans monteront à cheval et chargeront à l’improviste. Peut-être que Dieu nous aidera et nous donnera la victoire, car c’est de Dieu que vient tout secours. Ibn-Sâd ayant entendu ce conseil, fit venir Abd-Allah, fils d’Abbas, et les deux frères de celui-ci, ainsi que les compagnons de Mahomet avec les chefs de tribu, et leur soumit la proposition d’Ibn-ez-Zobeir. Ils y donnèrent leur approbation en rendant grâces à Dieu et s’abstinrent d’en parler à qui que ce fut. Ils passèrent la nuit à faire leurs préparatifs, se dévouant à Dieu pour l’exaltation de sa religion et la manifestation de sa parole. Le matin arrivé, les braves de l’islamisme restèrent dans leurs tentes, ayant leurs chevaux à côté d’eux, pendant qu’Ibn-ez-Zobeir et Ibn-Sâd avancèrent au combat à la tête d’un petit corps de troupes. L’on se battit avec beaucoup d’acharnement, et comme il faisait très-chaud ce jour-là, on en ressentit des deux côtés une lassitude extrême. Le prince des Grecs était à cheval et encourageait ses troupes ; il avait avec lui l’étendard de la croix et portait un diadème sur sa tête, vu son rang élevé. Le conflit se prolongea jusqu’à ce que l’appel à la prière de midi se fît entendre ; alors les Arabes allaient se retirer comme d’habitude, quand Ibn-ez-Zobeir fit durer le combat une heure de plus. La chaleur étant devenue