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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

Caze, par un reste de pudeur, ne publia pas cet arrêt dans son texte ; il n’en fit connaître que le dispositif. — Ainsi opérait le Conseil des Dix[1]. Ceux que le mystérieux tribunal condamnait étaient étranglés ; ceux qu’il acquittait restaient flétris. Ce fut le cas de Du Paty.

Picquart se pourvut en cassation[2].

Bertulus rendit alors sa deuxième ordonnance ; il renvoyait devant la cour d’assises, pour faux et usage de faux, Esterhazy et sa maîtresse[3].

Le ministère public forma aussitôt opposition.

Tézenas compagnonnait avec le procureur de la République Feuilloley, qui allait au rapport chez Cavaignac[4], et avec Bertrand, le procureur général ; il persuada Esterhazy de se tenir tranquille, de ne déposer aucun mémoire[5].

Les choses étaient si bien réglées d’avance, selon le plan de Cavaignac dont il ne s’était pas départi un

  1. Siècle du 10 août 1898. (Par la Vérité, 303.)
  2. 8 août.
  3. 9 août 1898. — L’ordonnance de Bertulus précisait qu’il n’y avait pas charge suffisante contre Esterhazy et la fille Pays d’après les auteurs de la lettre en date du 15 septembre 1896 faussement signée Speranza. » Picquart les en avait, en effet, accusés ainsi que Du Paty. Bertulus, dans sa première ordonnance, avait rappelé cette accusation de Picquart, mais sans la prendre à son compte. Cette fausse lettre Speranza aurait dû mettre Picquart sur la voie d’Henry, qui seul avait pu fabriquer ce faux (Voir t. II, 458) et qui, dès lors, auteur de la fausse lettre Speranza, l’était nécessairement de la fausse dépêche du même nom. — Le procureur général Bertrand communiqua seulement la partie de l’ordonnance de Bertulus qui était relative à la lettre Speranza. Picquart dut réclamer par huissier la communication intégrale. (10 août 1898.)
  4. « Après son entrevue avec le Garde des Sceaux, M. Feuilloley s’est rendu au ministère de la Guerre. » (Petit Journal du 10 août 1898.)
  5. Dessous de l’Affaire, 40.