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CAVAIGNAC MINISTRE


ingénieux : « Le conseil de l’Ordre l’a suspendu, non seulement pour avoir consulté hors de son cabinet en allant prendre connaissance du dossier Boulot au bureau des Renseignements, mais pour avoir révélé à un tiers (Scheurer) les confidences de son client. » En vain a-t-il allégué, sur ce second chef, que Picquart lui avait confié « un mandat général de défense » et l’avait ensuite couvert. Le conseil s’était tenu strictement à la règle tutélaire qui refuse aux clients d’un avocat le droit de le relever du secret professionnel institué dans un intérêt général. Ainsi la peine disciplinaire qui lui avait été infligée démontrait le bien fondé de ses dires ; comme il n’avait point fait appel, c’était la chose jugée dans toute la force du terme ; Fabre devait s’incliner devant elle ; et cette res judicata comportait une autre conséquence : frappé par son Ordre pour avoir révélé à Scheurer le secret d’un client, il ne pouvait pas l’être une seconde fois par la justice correctionnelle pour le même fait : non bis in idem.

D’ailleurs, il assuma toute la responsabilité :

J’ai agi conformément à l’intérêt du colonel Picquart, mais je ne puis pas dire que j’ai agi conformément à ses désirs, car il n’en avait exprimé aucun et il s’en rapportait à moi du choix des moyens. Aussi aurait-il pu se dispenser, s’il l’avait voulu, de dire devant la cour d’assises qu’il approuvait complètement ce que j’avais fait. Il lui aurait suffi de dire qu’il ne me désapprouvait pas. Je ne lui ai fait part de mes démarches qu’en décembre 1897[1].

Fabre fit à Leblois l’honneur mérité de croire qu’il

    rer n’avait pas qualité pour connaître de ces renseignements et qu’il ne s’en était servi que dans l’intérêt de Dreyfus ».

  1. Instr. Fabre, 117, 121, 135, 178, 181, etc., Leblois.
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