Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/173

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
169
LA MORT D’HENRY

Si Drumont et Esterhazy avaient su que le faux d’Henry était découvert, Drumont eût donné tout de suite son viatique à Esterhazy. Pour Henry (à en croire l’un de ses faussaires ordinaires, l’agent Decrion qui avait remplacé Lemercier-Picard et doublait Guénée), il prit ses précautions, envoya ses papiers, sa correspondance avec Esterhazy, en lieu sûr, à l’étranger[1].

V

Le conseil d’enquête se réunit à huis clos le 24 août, à la caserne du Château-d’Eau. Il était présidé par le général Florentin, assisté du général Langlois, du colonel de Kerdrain, des commandants de Savignac et Brochin.

Le rapporteur (Kerdrain) énuméra sévèrement les charges. D’abord, les lettres à Mme de Boulancy « dont une seule apparut suspecte aux experts » ; les autres, « dont tout cœur de Français se révolte », sont authentiques ; puis, les articles de la Libre Parole, les lettres à Félix Faure ; « le patriotisme d’Esterhazy aurait dû arrêter sa plume » ; la visite à Pellieux, en juillet, « la menace de peser sur l’esprit des chefs par des procédés inavouables » ; enfin, « l’inconduite habituelle » de l’homme qui loge chez « une ancienne femme galante », et qui a commandité une proxénète ; la tenancière l’appelait « son associé » ; il lui rabattait des clients ; l’an passé, il lui donna commission, ainsi qu’à deux agents

  1. Dép. de Decrion à la Cour de cassation (17 janvier 1899).