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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


exprès, aux conseils de guerre) ; il faut encore qu’il ignore la charge précise qui est invoquée contre lui ; et comme Chanoine, au rebours de Zurlinden, redoute que l’accusation de faux tombe d’elle-même, il corse l’inculpation, non seulement avec les affaires (Boulot et pigeons-voyageurs) sur lesquelles le juge Fabre s’est déclaré incompétent, mais avec l’affaire du dossier secret, dont le tribunal correctionnel a été saisi et qu’il a retenue, en vertu même de son arrêt de sursis[1]. — En conséquence, Tavernier va reprendre le bloc des dénonciations et des menteries d’Henry, et les amis d’Henry leurs témoignages à l’appui, amplifiant et aggravant, comme il arrive quand on raconte plusieurs fois la même histoire : à chaque nouveau récit, on y introduit un détail nouveau[2]. — Si écœurant que ce fut pour Pic-

  1. Ordre supplémentaire du 14 octobre 1898. — Picquart, le 17, dans une lettre à Zurlinden, dit que la question relevait, « en droit et en équité », de la justice civile.
  2. Notamment Junck. Modifiant ses dépositions antérieures (Instr. Ravary, 16 décembre 1897, et Instr. Fabre, 16 juillet 1898), il soutint que Picquart avait voulu faire attester par Lauth, non pas que la carte-télégramme provenait de l’ambassade allemande, mais qu’elle était de l’écriture de Schwarzkoppen (11 octobre 1898). — Il avait été attaché aux cabinets de Cavaignac et de Zurlinden. (Cass., I, 159, Picquart.) — Pour Bertillon, il se convainquit lui-même de mensonge, et Lauth avec lui. Au procès Zola, Lauth avait dit qu’il avait photographié les premiers échantillons de l’écriture d’Esterhazy en mai 1896, Bertillon que Picquart les lui avait fait voir à cette même date. Or, c’était la lettre d’Esterhazy à Calmon du 25 août 1896, dont Bertillon apporta le fac-similé à Tavernier. (30 septembre 1898.) — Quelques dépositions furent véridiques, celles de Curé et d’Abria sur leurs conversations au sujet d’Esterhazy, de Pauffin sur la lettre de Foucault, de Calmon sur les lettres d’Esterhazy et de Weil, de Desvernine, etc. — le désaccord entre Picquart et Curé sur la date de leur premier entretien est de peu d’importance, (Rennes, I, 418, Picquart ; II, 239, Curé.) — Scheurer s’indigna « qu’on mit sa parole en balance avec celle d’un faux témoin » (Savignaud). — Boisdeffre convint que Picquart ne lui