Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/519

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
515
LE DESSAISISSEMENT


maintenant deux écritures se rapportant à celle du bordereau ». Toujours la même fausse honte, le même amour-propre empêchaient d’avouer qu’on s’était trompé[1].

Les officiers de l’ancien bureau des Renseignements ne montrèrent pas moins d’entêtement, Gribelin, Valdant, surtout Junck et Lauth, pleins de l’esprit d’Henry, Junck releva contre Dreyfus qu’il avait salué un jour des femmes galantes ; Lauth reprit ses vieux contes, avec une sorte d’indécence dans la méchanceté[2].

Deux anciens officiers, le général Sebert, de l’Académie des sciences, et le capitaine Moch, et deux commandants d’artillerie, Ducros et Hartmann, consolèrent de ces malignités et de ces rancunes recuites[3]. Hartmann, d’écorce rugueuse mais de cœur chaud, Alsacien et catholique, apparenté à des religieux, ancien camarade de Cavaignac à l’École polytechnique, parut le type le plus élevé du savant militaire. Avec Sebert et Moch, il démontra que l’impropriété des termes du bordereau démontrait un officier étranger à l’artillerie ; qu’il n’y avait rien de moins secret que le Manuel ; que ces fameuses notes, dont on avait fait un épouvantail, étaient relatives à des sujets traités vingt fois par la presse, et qu’un officier d’une arme quelconque aurait pu les rédiger avec des extraits de journaux et de

  1. Cass., I, 482, Bertillon ; 501, Charavay ; 503, Teyssonnières ; 505, Couard ; 507, Varinard et Belhomme. Pelletier (500) maintint simplement sa déposition favorable à Dreyfus. — Teyssonnières, dans une affaire Labougne-Beauregard, venait de commettre une nouvelle erreur qui lui valut, ultérieurement, une condamnation sévèrement motivée du tribunal du Blanc (8 janvier 1901).
  2. Ibid., I, 411, Lauth ; 425, Junck ; 430, Gribelin ; 437, Valdant.
  3. Ibid., I, 473, Sebert ; 509, Moch ; 515, Ducros ; 518, Hartmann.