Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/559

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
555
MORT DE FÉLIX FAURE


commission du Panama, le discours de Viviani affiché sur toutes les murailles de France, le vote de blâme (on disait de flétrissure) où il avait été nommé avec Quesnay, Floquet, Rouvier, les parlementaires accusés de s’être compromis dans des affaires financières, et qui avait été rendu à l’unanimité de 515 votants, comme le vote sur le faux d’Henry[1].

Cependant, le sentiment de l’intérêt républicain, presque pareil dans ces circonstances au sens de la préservation de l’espèce, fut le plus fort. Bourgeois, qui s’était associé à ce vote de la Chambre précédente et qu’on croyait l’homme de Brisson, alla des premiers offrir la candidature à Loubet. Aussitôt Brisson, « qui avait été candidat à la présidence contre Carnot, Casimir-Perier et Félix Faure, déclara qu’il ne le serait pas contre Loubet[2], et Dupuy lui-même alla lui dire, bien qu’il grillât d’envie de se porter, qu’il se retirerait devant lui, ce qui simplifia beaucoup les choses. Le courant vers le président du Sénat devint aussi irrésistible que s’il avait été aveugle. Pendant que les gens du centre, les nationalistes et les royalistes s’agitaient, la plupart pour Méline que Drumont avait mis en avant[3], mais qui se dérobait, quelques intrigants pour Deschanel qui s’offrait, quelques retardataires pour Freycinet, d’autres pour Cavaignac, et Alphonse Humbert avec les « indépendants » pour Dupuy qui restait aux aguets, les républicains agirent. Ils savaient Loubet hésitant devant cette lourde responsabilité, préférant au demi-trône ballotté de l’Élysée son bon fauteuil tranquille

  1. Voir t. III. 568.
  2. La déclaration en fut faite par Bourgeois à la réunion des groupes de gauche : « M. Brisson acceptera la décision des groupes républicains. »
  3. Libre Parole du 17 février 1899.