Page:Journal asiatique, série 1, tome 1.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quand Dhérar eut cessé de parler, Jokana, qui avait écrit toutes les paroles sorties de sa bouche, plia la lettre qui les contenait, et chargea un homme affidé d’aller la porter aux musulmans. Lorsque l’envoyé fut arrivé devant Abou-Obeidah, il lui dit : J’ai à te remettre une lettre de la part d’un de ces guerriers qui languissent dans les fers à Antioche : il se nomme Dhérar, fils d’Al-Azwar. Alors Abou-Obeidah prit la lettre, en rompit le cachet, et la lut au peuple réuni autour de lui. Au récit funeste que Dhérar faisait de ses malheurs, tous les musulmans furent émus de compassion, et ils pleurèrent amèrement. Khoulah, sœur de Dhérar, instruite de ce qui se passait, accourut hors d’haleine, et s’adressant à Abou-Obeidah : Lis-moi, lui dit-elle, les vers de mon frère. Abou-Obeidah en commença de nouveau la lecture, et, presque au même instant, Khoulah fondit en larmes, ses forces l’abandonnèrent, et sa douleur devint si vive que le général des musulmans, croyant qu’elle allait expirer, ne put achever de lire les vers de Dhérar. Enfin Khoulah s’écria : Nous appartenons à Dieu, et nous retournerons vers lui : il est le seul puissant, le seul fort. Je jure de venger Dhérar. Tout le peuple eut bientôt gravé dans sa mémoire les vers de Dhérar, et il ne fut aucun musulman qui ne se plût à réciter les infortunes de ce guerrier.

Abou-Obeidah, impatient de poursuivre le cours de ses conquêtes, ne tarda pas à se mettre en marche vers Antioche. Il était accompagné de Khaled, fils