Page:Kant - Anthropologie.djvu/460

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perfection et à la santé de la vie physique, et devient ainsi un des plus puissants moyens diététiques et curatîfs. Nous ne voulons en aucune façon nier l'influence du corporel sur le spirituel, mais le pouvoir physique de l'esprit sur le corps est encore plus frappant et plus grand. Il peut faire naître des maladies comme il peut en guérir. Il y a plus, il peut tuer ou faire vivre. Ne voyons-nous pas très fréquemment l'épilepsie, les syncopes, les paralysies, les hémorrhagies, une foule d'autres maladies, et même la mort, survenir sous l'influence de la frayeur et d'autres émotions? Et de quoi meurt-on alors? Uniquement d'une action subite et violente de l'esprit sur le corps. Combien de fois les maladies les plus graves n'ont-elles pas résisté a tous les remèdes et cédé simplement à la joie, à l'éveil et à l'élévation de l'esprit! Le fils de Crésus, qui depuis longtemps avait la langue paralysée, recouvra la parole au moment où son père allait être assassiné. Pinel a observé que, grâce au mouvement général et passionné produit par la Révolution française, une foule d'individus, maladifs et languissants depuis des années, étaient redevenus bien portants et forts, et que les maux de nerfs, qui sont surtout les maladies des personnes opulentes, avaient entièrement disparu. Oui, je ne dis pas trop, si je soutiens que la plus grande partie de nos maladies nerveuses opiniâtres et de celles que l'on nomme spasmes, ne sont autre chose que la paresse, l'inertie de l'esprit, la suite du lâche abandon aux sentiments corporels et à leur influence.

Qui peut nier qu'ij y ait des merveilles et des guérisons merveilleuses? Mais que sont-elles sinon des effets d'une ferme croyance à une vertu céleste ou terrestre, et par conséquent des effets de l'esprit ?

Chacun connaît le pouvoir de l'imagination. Personne ne doute qu'il y ait des maladies imaginaires, et qu'une foule d'hommes ne soient malades que de l'imagination de la maladie. Ne serait-il donc pas aussi possible, et infiniment meilleur de se croire bien portant? et ne pourrait-on pas, par ce moyen,