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Page:Krafft-Ebing - Psychopathia Sexualis, Carré, 1895.djvu/204

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Le parallélisme est complet. Tous les actes et toutes les scènes qui sont exécutés par le sadiste d’une façon active, constituent l’objet des désirs du masochiste dans son rôle passif. Dans les deux perversions ces actes passent graduellement des procédés symboliques aux tortures les plus graves. L’assassinat par volupté lui-même, comble du sadisme, trouve sa contre-partie passive dans le masochisme, bien entendu uniquement comme imagination, ainsi que cela résulte de l’observation 53. Ces deux perversions peuvent, dans des circonstances favorables, subsister à côté d’une vita sexualis normale ; dans les deux cas, les actes par lesquels elles se manifestent servent de préparatifs au coït ou bien le remplacent[1].

L’analogie ne concerne pas seulement les symptômes extérieurs ; elle s’étend aussi à l’essence intime des deux perversions.

On doit les considérer toutes les deux comme des psychopathies congénitales chez des individus dont l’état psychique est anormal et qui sont atteints surtout d’hyperæsthesia sexualis psychique, et habituellement d’autres anomalies accessoires ; dans chacune de ces deux perversions on peut établir l’existence de deux éléments constitutifs qui tirent leur origine de faits psychiques intervenant dans la zone physiologique.

Ainsi que je l’ai indiqué plus haut, pour le masochisme, ces éléments consistent dans les faits suivants : 1o Dans la passion sexuelle, chaque action partant du consors provoque par elle-même et indépendamment de la nature de cette action une sensation de plaisir qui, dans le cas d’hyperæsthesia sexua-

  1. Naturellement toutes deux ont à combattre des contre-motifs esthétiques et éthiques dans le for intérieur. Mais, lorsqu’il les a vaincus, le sadisme, en se manifestant dans le monde extérieur, entre en conflit avec le Code pénal. Tel n’est pas le cas du masochisme, ce qui explique la plus grande fréquence des actes masochistes. Par contre, à la réalisation de ces derniers s’opposent l’instinct de la conservation et la crainte de la douleur physique. La signification pratique du masochisme n’existe que dans ses rapports avec l’impuissance psychique, tandis que celle du sadisme a surtout une portée médico-légale.