Page:Krafft-Ebing - Psychopathia Sexualis, Carré, 1895.djvu/31

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traiterons plus tard, il est nécessaire d’étudier les processus psychologiques qui rapprochent un homme et une femme, les attachent l’un à l’autre au point que, parmi tous les individus d’un même sexe, seuls tel ou telle paraissent désirables.

Si l’on pouvait démontrer que les procédés de la nature sont dirigés vers un but déterminé, – leur utilité ne saurait être niée,  – cette sorte de fascination par un seul individu du sexe opposé, avec de l’indifférence pour tous les autres individus de ce même sexe, fait qui existe réellement chez les amoureux vraiment heureux, paraîtrait comme une admirable disposition de la création pour assurer les unions monogames qui seules peuvent servir le but de la nature.

Quand on analyse scientifiquement cette flamme amoureuse, cette « harmonie des âmes », cette « union des cœurs », elle ne se présente nullement comme « un mystère des âmes » ; dans la plupart des cas on peut la ramener à certaines qualités physiques, parfois morales, au moyen desquelles la personne aimée exerce sa force d’attraction.

On parle aussi du soi-disant fétichisme. Par fétiche on entend ordinairement des objets, des parties ou des qualités d’objets qui, par leurs rapports et leur association, forment un ensemble ou une personnalité capable de produire sur nous un vif intérêt ou un sentiment, d’exercer une sorte de charme – (fetisso en portugais) – ou du moins une impression très profonde et particulièrement personnelle que n’explique nullement la valeur ni la qualité intrinsèque de l’objet symbolique[1].

Quand la personne qui est dans cet état d’esprit, pousse l’appréciation individuelle du fétiche jusqu’à l’exaltation, un cas de fétichisme se produit. Ce phénomène, très intéressant au point de vue psychologique, peut s’expliquer par une loi d’association empirique : le rapport qui existe entre une représentation fractionnelle et une représentation d’en-

  1. À consulter : Max Müller, qui fait dériver le mot « fétiche » étymologiquement du mot factitius (factice, chose insignifiante).