Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/31

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les mouchoirs aux passants, mais qui volent « honnêtement » leurs clients ; qui n’ont pas de passions, mais qui font en cachette leur visite à l’entremetteuse pour « se débarrasser de la graisse si monotone du pot-au-feu », qui croupiront dans leur marais, et qui crieront haro ! sur quiconque osera toucher à leur moisissure.

Voilà pour le garçon ! Quant à la fille, la bourgeoisie la corrompt dès le bas âge. Lectures absurdes, poupées habillées comme des camélias, costumes et exemples édifiants de la mère, propos de boudoir, — rien ne manquera pour faire de l’enfant une femme qui se vendra au plus donnant. Et cet enfant sème déjà la gangrène autour d’elle : les enfants ouvriers ne regardent-ils pas avec envie cette fille bien parée, aux allures élégantes, courtisane à douze ans ? Mais, si la mère est « vertueuse », — à la manière dont les bonnes bourgeoises le sont, — ce sera encore pis ! Si l’enfant est intelligente et passionnée, elle appréciera bientôt à sa juste valeur cette morale à double face, qui consiste à dire : « Aime ton prochain, mais pille-le quand tu peux ! Sois vertueuse, mais jusqu’à un certain point, etc. », — et étouffant dans cette atmosphère de moralité à la Tartufe, ne trouvant dans la vie rien de beau, de sublime, d’entraînant, qui respire la vraie passion, elle se jettera tête baissée dans les bras du premier venu, — pourvu qu’il satisfasse ses appétits de luxe.




Examinez ces faits, méditez-en les causes et dites si nous n’avons pas raison d’affirmer qu’il faut une révolution terrible pour enlever enfin la souillure de