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INDE. — INTRODUCTION.

l’unité divine d’Agni, antérieure à celle d’Indra. Puis vient le temps des Richis, ces poëtes religieux, qui chantaient dans la langue ancienne les bienfaits de l’Être tout-puissant, en lui dénonçant les méfaits des phénomènes naturels, la grêle, la glace, l’ouragan. Cette animation de la matière en mouvement n’est que de la poésie ; mais elle ne cache qu’aux inattentifs l’unité fondamentale. Enfin, la séparation amène deux dialectes, le sanscrit et le zend, et chaque grande émigration, tout en conservant des traditions analogues, se divise par les interprétations, c’est-à-dire par la théologie. Les méditatifs Aryas, avant leur séparation, tandis qu’ils formaient encore une alliance de tribus homogènes dans les plaines de la Bactriane, avaient observé la nature, et réfléchi sur les secrets de l’univers. Aussi, frappés tout autant par le spectacle des phénomènes physiques que par les mystères de l’existence, ils semblent s’être expliqué le principe du monde visible par le mouvement qui prouve la vie, et par la vie qui naît, croît, cesse, et se renouvelle constamment autour de nous. De là la conception d’un principe de vie, unique et général, indépendant des individus de toutes les espèces, dans le règne végétal comme dans le règne animal, se transformant, se divisant, se répandant partout. Les Indiens nommèrent ce principe Asoura, les Iraniens Ahoura, et c’est en lui que MM. Alfred Maury, Pavie, Eichhoff reconnaissent ce monothéisme, dont d’autres indianistes placent l’éclosion beaucoup plus tard. En tout cas, ce principe des Asouras, qui explique le monde pour les Aryas et justifie l’intervention des dieux, est le fondement de leur culte, et le sentiment inspirateur de leurs hymnes. Il est avéré, en outre, qu’avec le culte des éléments, ils avaient adopté le culte des mânes. La tradition le prouve surabondamment ; le respect de l’hymne de famille, l’évocation des aïeux autour du gazon sacré, le texte même de certains chants, tout confirme l’existence chez eux de cette vieille idée, qu’on trouve aussi dans la religion des plus anciens Grecs et Latins. Les Aryas honoraient leurs ancêtres, dont quelques-uns, tels que les Ribhous devenaient même des demi-dieux. Ils leur offraient des sacrifices : et c’est peut-être la raison déterminante de l’adoption des Védas par les brahmanes ; car ainsi était établie la valeur traditionnelle d’un recueil, auquel on donnait le sens de parole divine, prononcée et recommandée par des êtres surhumains.

En nous rendant compte du panthéon védique d’après la lecture des hymnes, et non d’après les commentaires brahmaniques, nous avons d’abord constaté une simplicité et une clarté toute en l’honneur des conceptions primitives et de l’esprit net et sobre de nos premiers ancêtres. Indépendamment de l’Asoura, ce principe générateur de la pensée religieuse et de ses symboles, nous trouvons trois grands dieux auxquels l’Arya-Indien s’adresse le plus souvent : ce sont Agni, le feu, Indra, l’éther et Sourya, le soleil. Quant à Aditi, la nature indivise, Varouna, le ciel étoilé, Vayou, l’air, Roudra, le vent, les Marouts, les brises, les Aswins, les crépuscules, Ousha, l’aurore, Prisni, la terre, ils n’apparaissent que comme dieux secondaires, puissants dans leur