Page:NRF 16.djvu/477

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

REFLEXIONS SUR LA LITTERATURE . 47 1

breux exemples dans la revue de Freud, Imago. J'en relèverai seulement deux, qui nous arrivent de la Suisse où la psycha- nalyse exerce dans les Universités un prestige parfois dangereux pour les têtes faibles : une préface de M. Pierre Kohler à Adolphe el un singulier petit livre de M. Vodoz sur Roland. (La Revue de Genève a d'ailleurs commencé la traduction de quatre leçons de psychanalyse par Freud, précédées d'une bonne intro- duction de M. Claparède.)

M. Kohler, ayant publié à Lausanne une fort jolie édition à! Adolphe, avec des éclaircissements et des documents bien choi- sis, l'a fait donc précéder d'une préface des plus curieuses. Tous ceux qui s'occupent de Constant sont aujourd'hui tributaires de la science et du labeur de M. Rudler, qui a donné à' Adolphe une édition modèle et a porté beaucoup de lumière dans les coins et recoins de son auteur. Or, dans sa thèse sur la Jeunesse de Cons- tant, arrivé aux rapports de Constant et de son père, il écrit : « On saisit mal comment Juste Constant, qui ne vécut pas beau- coup avec son fils durant ses vingt premières années et qui n'eût jamais avec lui de conversation suivie, put avoir une influence à la fois si intermittente et si décisive. Je pense qu'il y avait entre le père et le fils une identité de nature qui se réso- lut immédiatement, par le frottement et le choc des caractères, en une opposition irréductible. Deux électricités de même nom, qui se repoussaient. »

On voit à quel point l'explication, armée de la seule psycho- logie courante, reste superficielle et verbale. Et M. Kohler a bien raison de remarquer que voilà un cas où les théories de la psychanalyse sur le complexe paternel apportent à la critique une précieuse lumière. Il est bien certain que lorsqu'il nous rend compte de ses rapports avec son père, un psychologue artiste comme Constant arrivera à des profondeurs de vérité que la psychologie traditionnelle ne peut classer (et la plus grande partie d'Adolphe, qui nous paraît aujourd'hui si claire et si pro- che de nous, étant vraiment, quand le livre parut, et même longtemps après, inclassable et sans commune mesure). Mais précisément la psychanalyse nous montre que les cadres de la psychologie traditionnelle sont faits, malgré tout, de réalités conscientes, de réalités sociales, c'est-à-dire de réalités^secondes et dérivées. Les réalités premières et originelles, celles qui ont

�� �