Page:OC Flavius Josephe, trad. dir. Theodore Reinach, tome 1.djvu/118

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rite un châtiment et il est juste que nous le subissions tous, encore que la faute n’ait été commise par nul autre que par le plus jeune d’entre nous. Cependant, quoique nous désespérions de le voir sauvé, un espoir nous reste dans ta bonté et nous promet que nous échapperons au danger. Et maintenant, sans te soucier de nous, sans considérer notre méfait, prends conseil de la vertu et non de la colère, qui s’empare des faibles par sa violence et les dirige non seulement dans les affaires importantes, mais même dans les circonstances les plus communes ; fais preuve contre elle de grandeur d’âme et ne te laisse pas dominer par elle jusqu’à mettre à mort ceux qui cessent désormais de lutter eux-mêmes pour conquérir leur propre salut, mais qui aspirent à le tenir de toi. Aussi bien, ce n’est pas la première fois que tu nous l’auras procuré ; déjà, quand nous sommes venus en hâte acheter du blé et nous approvisionner de vivres, tu nous a fait la faveur de nous permettre d’en emporter aussi pour ceux de notre maison, de quoi les sauver du danger de mourir de faim. Or, c’est tout un de prendre pitié de gens qui vont périr faute du nécessaire, ou de s’abstenir de punir des hommes qui ont eu l’air de pécher et qu’on a enviés pour l’éclatante générosité que tu leur as fait paraître ; c’est la même faveur, accordée toutefois d’une façon différente : tu sauveras ceux que tu as nourris à cet effet, et ces existences que tu n’as pas laissé anéantir par la faim, tu les préserveras par tes bienfaits ; car il serait admirable et grand tout ensemble, après nous avoir sauvé la vie, de nous donner encore dans notre détresse de quoi la conserver. Et je crois bien que Dieu voulait ménager une occasion de faire briller celui qui l’emporte en vertu, en amenant ainsi sur nous tous ces malheurs ; il voulait qu’on te vît pardonner tes injures personnelles à ceux qui t’ont offensé et que ta bonté ne parût pas s’exercer uniquement sur ceux qui, pour une autre raison, ont besoin d’être secourus ; car s’il est beau d’avoir fait du bien à ceux qui étaient dans le besoin, il est plus généreux de gracier ceux qui ont été condamnés pour avoir failli envers toi ; car, si le pardon accordé à des fautes légères, commises par négligence, mérite des éloges, demeurer sans colère devant des actes tels qu’ils mettent la vie du coupable à la merci de la vengeance de