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Page:OC Flavius Josephe, trad. dir. Theodore Reinach, tome 1.djvu/19

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toriques, je fais une si large part aux questions cosmologiques[1]. Il faut donc savoir que, selon ce grand homme, pour bien organiser sa vie et donner des lois aux autres, il importe avant tout de comprendre la nature de Dieu, puis, en considérant par l’esprit les œuvres divines, d’imiter dans la mesure de ses forces le meilleur de tous les modèles et de tâcher de s’attacher à lui ; jamais, en effet, le législateur lui-même ne sera bien inspiré s’il néglige ces considérations, et ceux qui liront des traités sur la vertu n’en retireront aucun fruit, s’ils n’ont appris au préalable que Dieu, qui est le père et le maître de toutes choses et qui voit tout, accorde une vie heureuse à ceux qui suivent ses voies, mais accable de grandes catastrophes ceux qui marchent hors du chemin de la vertu. Telle est l’éducation que Moïse voulait donner à ses concitoyens ; aussi, lorsqu’il institua ses lois, ne commença-t-il pas par les contrats[2] et les droits réciproques, comme font les autres législateurs c’est vers Dieu et l’idée de la Création du monde qu’il éleva leurs méditations ; il les persuada que de toutes les œuvres accomplies par Dieu sur terre, nous, les hommes, nous sommes la plus belle, et lorsqu’il les eut convertis à la piété, il n’eut plus de peine à les convaincre de tout le reste. Les autres législateurs[3], en effet, s’en

  1. Josèphe entend par là des explications sur la naissance du monde et l’origine des choses.
  2. Dans le Midrasch (Tanhouma sur Bereschit), Rabbi Isaac Nappaha (Amora palestinien de la fin du IIIe siècle ap. J.-C.) se demande pourquoi la Tora ne commence pas par l’exposé des lois de Moïse (Exode, XII, 2). Il pense que le récit de la création est destiné à faire éclater la grandeur et la puissance divines. Philon (préface du De opificio mundi, 1. Mangey, I, 1) s’exprime d’une façon tout analogue μήτ’εὐθὺς ἃ χρὴ πράττειν ἢ τὸ ἐναντίον ὑπείπων  « il (Moïse) ne prescrivit pas tout de suite ce qu’il faut faire ou ne pas faire ». Des opinions diverses ont été émises sur la question de savoir si Josèphe a utilisé ou non les œuvres de Philon, qu’il a, d’ailleurs, connu, comme il ressort de Ant., XVIII, § 259. Voir à ce sujet Siegfried,  Philo von Alexandria, Iéna, 1875, et Bloch,  Die Quellen des Fl. Josephus. Même en refusant d’admettre que Josèphe ait suivi Philon, on peut penser qu’il a puisé aux mêmes sources que lui, à savoir les traditions agadiques. Philon dit, en effet (De vita Moysis, M. II, 82, §1) : μαθὼν αὐτὰ … παρά τινων ἀπὸ τοῦ ἔθνους πρεσβυτέρων « ayant appris ces détails de quelques anciens de la nation ».
  3. Philon, ibid. : οἱ δὲ πολὺν ὄγκον τοῖς νοήμασι προσπεριλαβόντες ἐξετύρωσαν τὰ πλήθη, μυθικοῖς πλάσμασι τὴν ἀλήθηιαν ἐπικρύψαντες « les autres (législateurs), met-