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SABBAT

qu’on sape, la mer qu’on frappe, la forêt qu’on abat.

La faim, la soif, la santé, le désir sont les désespoirs enivrés du corps.

Console-moi.

Heureuse la nudité qui peut se parer d’une rose ! Heureux le sein auquel peut adhérer la perfection de la coupe vide ! Heureuse la hanche qui répète la courbe de l’amphore, la lèvre qui veut en avoir la destination sacrée !

Mais, avant de me dévêtir, je songe — Ah ! première révolte des chevelures au soleil ! — Je me vois quand j’étais petite. Je portais, dans ma robe de baby, la promesse de l’éclosion future. Je possédais, déjà, la fierté, l’assurance de la femme qui sait, pendant toute son existence, qu’elle est cette énigme que les plus vrais de ses regards ne trahiront jamais.

J’avais la vie pour attendre la vie. Je devinais que je grandissais vers toi, pour toi, ô Inconnu, Étranger, Ennemi !… Frère en solitude et tourment…

Je pressentais que j’employais ma santé d’enfant à me faire une santé plus forte, plus définitive, plus troublante, plus particulière, une santé de seins robustes, de joues amoureuses, de ventre rond, de jambes hardies, de bouche souriante, affamée et tendre.

Mais il y a après… Et la pluie qui tombe, quelquefois, dans l’assouvissement, sur la vi-