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Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/217

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SABBAT

mélancoliquement légers sur la mer plus voyageuse…

Je te dis : « Silence… », et nous écoutons des pas furtifs dans les couloirs de nos songes. Je te dis : « Regarde… », et, pour te pencher sur mon âme, tu élèves lentement la lampe de Dieu. Je te dis : « Non… », et tu sais combien le gant, le masque, et la rose sont, sur moi, impitoyables. Je te dis : « Oui… », et l’univers s’approche de toi, et le blé, et les arbres, et les bêtes curieuses et méfiantes ont le visage de mon consentement.

Mais ma couche étroite, pure et farouche, a celui de mon divin refus.

Va-t’en !

Pourquoi resterais-tu ? M’étreindre dans l’espace d’un lit ? Ah ! ah ! La damnation est ailleurs, et, sûrement, dans nos silences. J’ai pitié et non horreur des serfs de la chair. Les magnifiques et les maudits, c’est nous, les chastes, et la tentation qui naquit de la bouche sifflante et de la divine tête plate et condamnée n’est que pour nous. Seuls sont assaillis ceux qui résistent, hantés ceux qui se dérobent, possédés ceux qui ne possèdent pas, et la luxure sacrée est la grande pudique : jamais elle ne consent à danser devant deux Satans, la Dame pourpre. « Un seul… » murmure-t-elle, et encore faut-il qu’il ferme les yeux.