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SABBAT

Les péchés de la chair ? Ils sont si vite expédiés par nous, ils sont si discrets, les pauvres ! Ces péchés-là ? Peuh !…

— Entendu. Ce sont les vôtres.

— …Mais le péché d’orgueil ! Le péché de révolte !

— J’ai affreusement pâti de votre religion. Au nom de quoi voulez-vous que je ne le crie pas ?

— Elle combattait votre esprit détestable.

— C’est possible. Mais quels drôles d’apôtres elle a fait se dresser contre moi ! Ils m’ont plus torturée, encore, par leurs exemples que par leurs menaces.

— Que voulez-vous ? Ce sont des hommes comme les autres…

— En effet… En effet… Mais, en somme, ce n’est pas tant leurs faiblesses que je leur reproche, bien que leur sacerdoce devrait les garder en grâce et en dignité, comme je suis gardée en dignité et en grâce par mon sacerdoce : la Poésie. Ce que je hais en eux, c’est ce goût par trop frénétique pour les grincements de dents, les tortures, le désespoir éternels… des autres.

On se délivre, enfin, de cette imagerie délirante, mais songez aux enfants trop sensibles qui ne la perdent plus des yeux à l’âge où l’on doit faire son salut à coups de poings, le soleil sur l’échine.

Quel drame pour ceux qui ont connu cette obsession-là !

Un saint ministère ? En voulez-vous un ?