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Page:Régnier - L’Illusion héroïque de Tito Bassi, 1917.djvu/185

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lettre me combla d’une affreuse confusion. Ainsi, jusque dans l’amour, me poursuivaient les stigmates de ma misérable condition. Ce qu’on attendait de moi, ce n’était ni un sentiment vrai, ni une passion sincère. Je serais donc toujours réduit à jouer le piteux personnage de celui dont on veut tirer à tout prix de l’amusement ; j’étais à jamais condamné à faire rire, et cette perspective me causait une rage inexprimable. Si mes compagnons acceptaient tranquillement le bénéfice d’un pareil métier, je n’étais pas comme eux résigné à m’en accommoder. Le consentement à une destinée à laquelle je répugnais de tout mon être eût achevé de m’avilir à mes propres yeux. Plutôt renoncer à l’amour que de lui servir de jouet ! Plutôt vivre solitaire que de me prêter à ce qu’on escomptait de moi ! À la chandelle à demi consumée qui éclairait mon logis, je brûlai la lettre détestable et, par la fenêtre, je lançai sur le pavé