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Page:Régnier - L’Illusion héroïque de Tito Bassi, 1917.djvu/204

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la rue pour la lorgner et lui adresser des signes. En me faisant ces confidences, Pierina ne se doutait pas qu’elles venaient fort mal à propos. Je me trouvais, en effet, dans un singulier état d’irritation et de tristesse. La vue de Vicence avait réveillé en moi l’amer souvenir de mes illusions perdues. Les nobles architectures palladiennes de la cité me rendaient plus cruel le sentiment de ma déchéance. Moi, qui avais si souvent rêvé qu’elles seraient les témoins de ma gloire et qu’elles accueilleraient mon triomphe, je me présentais à elle dans un bien piteux équipage, celui de pauvre comédien errant et de mari jaloux d’une femme coquette, et dont la coquetterie s’amusait à mes dépens.

Car Pierina, en voyant ma mine renfrognée, n’avait pu s’empêcher de rire. L’imprudente ne se rendait pas compte que ce rire qui, plus d’une fois, m’avait désarmé, me rappelait aujourd’hui ceux qui m’avaient jadis fait