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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/313

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leurs propos les plus sincères. Quoi ! cette sorte d’amour que vous offrez ne consiste-t-il pas en une espèce de plaisir que vous prenez aussi bien presque avec la première venue et que vous exigez que nous vous donnions, sans vous inquiéter de savoir si c’en est un pour nous que ces caresses qui finissent par nous rabaisser assez vite à vos yeux, car si d’avance elles vous paraissent je ne sais quoi de singulier et de délicieux, elles ne tardent guère ensuite à vous sembler quelque chose par où nous sommes toutes à peu près égales entre nous, si bien que vous n’y voyez plus une raison d’être tenus à la reconnaissance que vous nous en promettiez auparavant ?

Madame de Blionne reprit, en s’animant à mesure qu’elle parlait :

– Vous me faites l’honneur d’avoir pour moi un de ces désirs auxquels le langage du siècle donne le nom d’amour, et je veux bien croire que ce mouvement de vos sens est sincère, et même qu’il a quelque force et quelque entraînement véritable ; mais, pour être vrai, en serait-il durable ? Il vous est venu, monsieur, d’une impression fugitive qui s’est augmentée dans un esprit inoccupé et dans une imagination solitaire, mais qui sait s’il