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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/38

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il avec véhémence, – et tout cela parce que la nature a mis en moi un instinct qui est ma perte.

Et, d’un geste, il remonta ses chausses redescendues.

– Pourquoi faut-il, monsieur, que j’obéisse au démon de mes reins ? C’est lui qui me mène au péché et me conduira à l’enfer.

Ce mot, chaque fois qu’il le prononçait, produisait sur le visage de l’inconnu les marques d’une peur véritable. Il suait à grosses gouttes ; il passa sur son front sa main poilue.

– J’ai tout fait pour me contraindre, – continua-t-il, – et Dieu jusqu’à présent m’a refusé sa grâce, sans laquelle l’homme ne peut rien sur lui-même que de vains efforts où il s’épuise. J’aime les femmes, monsieur. Et ce penchant que je vous dis est plus fort que mon propos. Je me connais à leur sujet et je sais toute ma faiblesse et toute ma turpitude. C’est ce sentiment même qui m’a éloigné du mariage, car je pense que vous alliez m’objecter qu’en prenant femme et en la prenant belle j’aurais pu donner une issue légitime à une ardeur où je ne puis rien. Vouliez-vous donc que je souillasse le lit conjugal des désordres de ma concupiscence ou que j’ajoutasse à l’égarement de mes passions le