Page:Rabbe - Album d’un pessimiste, I, 1836.djvu/41

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parcourt, lorsqu’en certains jours solennels elle est menée en grande pompe.

Négligeons tout ce qu’il serait facile d’accumuler ici de citations historiques : le sacrifice n’est-il pas aussi l’article fondamental, le dogme essentiel de notre sainte religion ! Pourquoi dit-on le saint sacrifice de la messe ? Parce qu’un Dieu incompréhensiblement homicide de lui-même, livra son fils, se livra lui-même au supplice pour opérer notre salut. La messe n’est que la commémoration par son renouvellement, de ce mystérieux sacrifice.

Les bûchers de l’inquisition étaient bien aussi quelque chose de ce genre : il s’agissait toujours d’apaiser un Dieu irritable et jaloux. Le vœu de virginité, celui de pauvreté, d’ignorance, d’abnégation de soi-même, tous ces tourmens prolongés de la vie claustrale, qu’est-ce autre chose que la mutilation douloureuse de son être et une sorte de suicide journalier et permanent par lequel l’homme prétend être agréable à la Divinité ? Lequel est le plus cruel envers lui-même, lequel se détruit le mieux de celui qui s’immole d’un seul coup, ou de celui qui s’extermine en détail et porte par lambeaux la victime sur l’autel ?

Je n’ai pas besoin d’examiner si les idées que l’homme s’est faites de la Divinité et des moyens par lesquels il peut lui plaire, sont conformes ou non à la droite raison, injurieuses ou honorables