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l’hôpital à chercher un nouveau médecin. Le 5 mars, après avoir patienté quelque temps, sur l’assurance que Rabelais était à Grenoble et qu’il n’allait pas tarder à regagner Lyon, on lui donna un successeur.

Maître François se consola en repartant au milieu de l’été pour l’Italie avec Jean du Bellay, devenu cardinal. Il s’arrêta à Ferrare, à la cour de la duchesse Renée de France, où se trouvaient Clément Marot et Lion Jamet, contraints à l’exil par l’affaire des « placards ». Il visita Florence, émerveillé « de la structure du dôme, de la somptuosité des temples et palais magnifiques ». Il reprit surtout à Rome sa vie d’observateur curieux, en « compagnie de gens studieux, amateurs de pérégrinités », comme le voyageur André Thevet à qui il servit de guide et d’introducteur. Un jour il assistait à l’entrée d’Alexandre de Médicis, une autre fois la maison du pape allait au-devant des ambassadeurs vénitiens. À tout instant on s’attendait à l’arrivée de Charles-Quint. La ville était pleine d’Espagnols. On abattait églises et palais pour préparer une voie triomphale à César.

Puis c’étaient les entrevues diplomatiques auxquelles le cardinal du Bellay le faisait assister, les démarches en cour de Rome pour les affaires de l’évêque de Maillezais, les fleurs ou les légumes nouveaux à envoyer à son protecteur pour les jardins de Ligugé ou de l’Hermenaud. C’étaient surtout les sollicitations et les suppliques nécessitées par la régularisation de sa propre situation monastique.

Telle fut la vie de Rabelais jusqu’au printemps de 1536. Quand il rentra en France, il emportait une absolution du pape Paul III, conçue dans les termes les plus honorables, avec permission de pratiquer librement l’art de la médecine, et de reprendre l’habit de Saint-Benoît dans un monastère de l’ordre autre que celui de Maillezais.

Cette clause visait l’abbaye de Saint-Maur-des-Fossés, dont Jean du Bellay était abbé, et où il offrit asile à son protégé, sous une règle religieuse d’autant moins sévère que le monastère, venant d’être érigé en collégiale, maître François devint chanoine prébendé.

Il est à croire qu’il passa quelque temps dans « ce paradis