Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/197

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de Bryon, on aurait peut-être découvert qu’il s’était battu surtout pour plaire à la duchesse.

Maintenant qu’elle était venue, qu’elle avait déclaré que le garçon le mieux élevé de Paris c’était le comte de Bryon, il se félicitait, il se pelotonnait voluptueusement dans ses douleurs d’épaule, parfois très aiguës, en savourant le piquant plaisir d’être aimé, du même coup, des siècles passés et du temps à venir.

Vers dix heures du soir, un léger heurt retentit contre la porte mystérieuse, la porte vêtue de soie rose. L’abbé ne bougea pas, mais il fronça les narines, un peu inquiet. La duchesse engourdie par la chaleur de la chambre somnolait dans son voltaire, le valet de chambre était sorti et le docteur ne devait revenir qu’en cas de complications.

— Entrez ! risqua l’abbé, percevant un second choc.

La porte rose fut poussée et se referma avec sa vivacité habituelle ; une belle fille de dix-neuf ans fit irruption.

— C’est trop fort, Mademoiselle, dit le prêtre qui devinait que celle-là n’était pas duchesse.

— Eh bien !… quoi ?… s’écria Marie Grévinette, la plus splendide créature du quartier latin J’ai passé l’eau parce que je me mourais d’inquiétude. Chéri en pensera ce qu’il voudra, du moment qu’il n’est pas mort… j’en prends l’absolution…

D’un bond, la folle s’était élancée vers le lit et avait collé ses lèvres sur les lèvres du blessé.