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Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/108

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ce qui nous semble convenable de penser, mais, par-dessus tout, elle doit nous conduire à la réalité. Les histoires que nous racontons sont bonnes pour endormir les peines, mais elles sont mauvaises quand elles endorment aussi les consciences.

La femme de lettres d’aujourd’hui, sorte de mannequin de magasine, vêtue d’un travesti qu’elle ne choisit pas toujours, hélas, et qu’elle n’arrive pas plus à dépouiller qu’une tunique de Nessus, est en train de se confectionner un manteau sortie de bal tricolore… parce qu’elle n’a plus rien à se mettre, terme consacré ; seulement les dessous sont encore, pour beaucoup, des maillots de cabotines. Le feu de la rampe, le feu le moins sacré que l’on sache, continue à faire flamber leurs bonnes intentions : « Il nous faut tenir, m’écrit l’une d’elles, en rouvrant nos salons pour bien montrer que nous n’avons pas peur de l’avenir. On ne ferme pas devant l’ennemi. » La jeune personne qui m’écrit cela n’a perdu encore ni son mari, ni son fils, ni son frère, et elle n’est pas encore devant l’ennemi. Moi,