Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/35

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ans au… trou dans lequel je suis tombée, je m’étonne que tout aille si bien,… et puis il y a ceux qui n’en reviendront pas, eux, du trou ! Je ne peux plus rentrer à Paris parce que j’ai eu le soin de me lier ici par un collier terriblement fort : celui des responsabilités, et je tire dessus par dépit, pour faire acte de sauvagerie sinon d’indépendance, sachant à n’en pas douter que le collier ne cédera point, puisque je l’ai rivé moi-même. J’ai voulu vivre cette vie, j’ai librement choisi mon emprisonnement dehors, en dehors de toutes les complications mondaines et il en résulte un inextricable nœud d’obligations rurales, agrémentées de touffes d’orties. Si loin du pays des sept robes et des treize bonnets, comment, du reste, y retournerais-je, en mes haillons couleur de poussière ou de boue ? Mon imagination est vraiment grosse d’une portée de toutes les espèces de monstres. Il vaut mieux les mettre bas… près d’une rivière.

Je m’évertue à me limiter aux besoins du pain quotidien, pourvu qu’il soit complet, franc de goût, du pain de guerre. Oh ! le bon pain !