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Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/92

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ces petits frères, mais je ne me reconnais pas le droit de donner aux plus forts celui d’opprimer le plus faible. Si je lâchais tout ce joli monde, si j’abattais une seule cloison, ils s’en iraient en un tourbillon de plumes et de poils… peut-être ne resterait-il que la louve allemande se léchant discrètement les ongles…

Plus loin, les chèvres bêlent tristement, en dehors de mon cercle familier. Je ne sais pourquoi ma vieille Pierrette m’appelle, puisque c’est la femme du poilu qui la nourrit, ayant besoin de son lait pour les enfants. Je n’ose pas aller la voir… non, je n’ose plus… Il me semble que mes visites seraient comme un contrôle, un espionnage de bourgeoise se méfiant de l’intruse. Et cette femme fantôme pourtant m’inquiète. Je me forge des chimères à son sujet. Je ne la comprends pas. Depuis un an qu’elle est ici, elle porte en elle un mystère que je ne pénètre pas et ma réfugiée belge en avait une sorte de répulsion. Ce que ma réfugiée ne trouvait pas clair, elle dont les yeux avaient la lumière d’un jour bleu, n’était vraiment pas rassurant… ça devient de moins