Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/237

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L’adolescent se leva, tout debout sur la pente de la toiture, et bondit, comme Lion.

— Faudrait pas vous foutre de moi, mademoiselle ! Je suis un nigaud, mais je suis pas sourd !…

— Vous trouvez que cent francs…

— Répétez pas ça, ou je vous jette par-dessus le bord.

Il se croisa les bras, se campa dans la clarté de la lune, formant une grande ombre gesticulante sur le toit blafard.

— Je vous connais pas, reprit-il exaspéré, je sais pas d’où vous provenez ; vous m’avez causé de la peine, un soir, et je vous ai cherchée, sur les toits, à en perdre le boire et le manger ; je crois même que mon cœur en a fait une maladie… Cependant, faudrait pas abuser de ma patience ; oh ! je sais bien que c’est défendu de rigoler avec les filles de la haute quand on est du pauvre monde, mais je ne vous dis pas de mauvaises paroles, j’ai pas manqué de respect à votre robe de velours… alors, je vous retire l’autorisation de m’insulter.

— Voyons, mon enfant, je vous insulte en vous offrant de vous enrichir ?…

Auguste, frissonnant, la regardait d’un air peureux.

— Vous me prenez pour un souteneur ! lâcha-t-il, claquant des dents.

— Un souteneur, répéta Laure ahurie.

Et elle ajouta, éclatant de rire :