Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/238

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— C’est vrai, mon Dieu, je n’y pensais plus.

— Vous trouvez ça drôle, vous ?

— Ne vous fâchez pas, Auguste, et surtout ne criez pas si fort !… Allons, parlons d’autre chose.

— Qui c’est qui vous embête ? Hein !

Il s’allongea de nouveau en face d’elle, mais cette fois la tête touchant sa tête, les yeux dans les yeux.

— Je voudrais donner une leçon à un individu qui oublie que je l’ai aimé.

— C’est donc possible de vous oublier ? balbutia l’adolescent, les lèvres palpitantes.

Laure, flattée de ce naïf hommage, lui sourit. Un instant, comme un double éclair livide, leurs bouches ouvertes laissèrent étinceler leurs dents de jeunes loups.

— Hélas !… soupira Laure.

— Voilà pourquoi vous êtes un brin folle, et pourquoi vous galopez la nuit sur les gouttières ?

— Peut-être, mon cher enfant.

— Ah ! vous pouvez vous vanter de m’avoir estomaqué, mademoiselle la trop curieuse ! Ce que vous sentez bon, tout de même ! Et dire qu’il y a des femmes, comme ça… presque autant qu’il y a là-haut de chandelles !

Et il montra les étoiles.

— Auguste, c’est à votre tour de vous tromper, vous me prenez pour une fille et je suis… une amoureuse…

Il pouffa.